Hussein Haidara et la mémoire de la cruauté


(désacralisation du corps, sacralisation de la mémoire)






''(…) l'action théâtrale (...) questionne tout, rouvre les tabous et conflits cachés et essaye de mobiliser et non pas de satisfaire le public.''
Aida Hozic in, The Inverted World of Spectacle: Social and political responses to terrorism, in Terrorism and Modern Drama, 1990, pp.66-67



Le travail de Haidara est théâtral, toujours violent, nous ramenant à notre condition d'Homme et à notre propre mortalité. 

vue de l'atelier de l'artiste au Ksar
Son questionnement continu de ce qui fait que l'homme (pour des raisons politiques ou religieuses) puisse faire du mal à l'autre au travers de la torture, la guerre ou la simple élimination des vies humaines est comme un fil conducteur dans son travail et sa recherche.



Comme un anthropologue ou un ethnographe, il reconstitue une carte de la violence dans le monde où hommes, femmes et enfants sont les victimes de la lutte pour le pouvoir.

les œuvres avant l'installation à Zeinart
 À travers cette installation Haidara veut rendre un hommage à toutes les victimes, quelle que soit leur ascendant ou leur appartenance ethnique et religieuse aux long des siècles.



Il veut que chacun de nous puisse dans sa tête identifier un passé proche ou lointain où un homme, une idéologie ou une croyance a utilisé la force et la violence pour faire prévaloir ses convictions.

Son installation où les couleurs ocre et les os prédominent nous renvoie à des images d'excavation ou des lieux de désastre.



vue du mur gauche, technique mixte ,  4.90 X 2.60 mt
Les figures sont plus proches des bêtes que des êtres humains - c'est comme cela que l'autre est perçu. Reconstruites à partir d'os d'animaux et d'autres matériaux que Haidara a recueillis pendant des mois et retravaillés, elles nous font penser à des corps en décomposition ou gisant dans les civières qui les ont ramenés du lieu de leur décès. Ses tableaux sont comme des strates géologiques, chaque couche transportant l'histoire de l'humanité.



Surtout, Haidara ne veut pas qu'on oublie ces morts qui se répètent sans cesse depuis la nuit des temps, fruits de l'action de l'Homme.

détaille mur côte droite

détaille côte gauche

vue central, technique mixte, assemblage


Ces événements diffusés par la télévision, la radio, les journaux et la culture sont eux-mêmes victimes de

 ''(...) la répétition et l'oubli qui caractérisent les informations dans les médias. On saute d'une indignité à l'autre, d'une crise à la prochaine, moins soucieux de répondre a l'indignation d'une façon transformatrice et active que de maintenir une conscience et des témoignages à peine en vie ... Les réponses publiques augmentent et diminuent en fonction des pulsations et du rythme de la couverture médiatique.'' 
 Bill Nichols dans ''Blurred boundaries''

La violence est banalisé à tel point que fiction et réalité se mélangent et que nous ne sommes guère touchés par ce que nous avons lu ou vu. Pire encore, nous ne nous posons plus de questions …

 

Haidara veut qu'on s'arrête, qu'on se pose des questions, qu'on prenne responsabilité de la violence qui est la nôtre.



Isabel Fiadeiro, avril 2014

vue de coté du tableau, 1.20cm X 0.96cm
''depuis le début'', technique mixte, 1.30cm X 1.10cm
''les herbes continuent a pousser'', technique mixte, 1.30cm X 1.10cm

Hussein Haidara, installation des peluches


vue de coté de ''les herbes continuent à pousser...''


 
enfance pendue, mur droite
détaille ''depuis le début'', technique mixte